Enquête traçabilité : zoom sur l’Atelier Fibre Laine
Je mène ma propre enquête afin d’en apprendre davantage sur la fabrication de la laine en France. Aujourd’hui : zoom sur l’Atelier Fibre Laine !
Pourquoi cette enquête ? Parce qu’en tant que tricoteuse, j’aime savoir d’où vient la matière que je tricote. J’ai choisi de me pencher sur les marques qui font fabriquer en France, dans un souci de consommer « local ». Je cherche des informations sur : la provenance des toisons, le respect de l’environnement à toutes les étapes de la fabrication, le traitement réservé aux animaux, l’engagement pour l’égalité femmes-hommes, l’insertion des personnes en situation de handicap…
Avant de commencer, quelques précisions
Cet article a été rédigé d’après les déclarations de la marque sur son site web. Il est issu d’un document que j’avais rédigé en avril 2018 et que j’ai mis à jour à l’occasion de la publication de cet article, en août. Chloé Hubert avait également accepté de répondre à mes questions par mail, en mars 2018.
Les photos sont issues du compte Instagram de l’Atelier Fibre Laine (lien plus bas dans l’article).
Je suis bien évidemment dans l’impossibilité d’aller vérifier moi-même chacun des points développés dans ce document. Cependant, quelques liens vous permettront de vérifier certaines informations par vous-même, ou tout du moins de vous faire votre propre idée.
L’Atelier Fibre Laine propose 3 fils différents :
- Céleste : 60 % Kid mohair 40% Soie (Lace), 200 m pour 20 gr environ – 12.50 €
- Cocon : 80 % Mohair de chevreau, 20% soie (Lace), 112m pour 25g environ – 10.00 €
- Nuage : 98% Mohair de chevreau 2% Nylon (Worsted), 100 m pour 50 g environ – 11.00 €
Un nouveau fil sera bientôt disponible : Caprinae : 50% Kid mohair, 50 % Mérinos, 200 m pour 50 gr – prix de lancement 13.00 €
(c) L’Atelier Fibre Laine
L’élevage et son environnement
L’exploitation est située au Moulin de Rousset à Vaulry, en Haute-Vienne (87). Elle représente : un hectare de maraîchage, un hectare de verger de pommes, un troupeau de brebis limousines pour la production d’agneaux d’herbe et un troupeau de chèvres angora pour la production de mohair (30 chèvres).
Chloé publie de nombreuses photos de ses chèvres sur son compte Instagram @latelierfibrelaine
Extrait de la FAQ du site de l’Atelier Fibre Laine :
Nous sommes labellisés en agriculture biologique, par conviction. Nous sommes convaincus que le soin à la terre et aux êtres vivants dans l’optique de recentrer nos vies vers l’essentiel est nécessaire à notre évolution en tant qu’humain. Nous prônons une agriculture saine pour les terres, les animaux et les humains.
Que faites-vous de vos chèvres âgées ?
Nous avons plusieurs circuits différents. Les chèvres qui produisent encore un joli mohair sont vendues à d’autres éleveurs, celles dont le mohair n’est plus valorisable partent en tondeuse écologique pour des particuliers. Quant aux très vieilles elles meurent à la ferme ou lorsque leur fin de vie est trop longue et douloureuse, nous les faisons euthanasier. Il nous arrivent aussi d’en réformer (ce qui signifie qu’elles partent à l’abattoir). Nous le faisons le moins possible en ayant une gestion de la reproduction et du renouvellement strict et planifié.
La ferme a mis en place quelques pratiques pour économiser l’énergie et l’eau : les locaux sont chauffés avec une chaudière bois bûche utilisant le bois de leurs terres. Les animaux sont abreuvés avec l’eau du puit.
Matières premières
La soie et le nylon sont fournis par la filature. L’origine est inconnue, probablement Asie pour la soie, Europe pour le nylon. La laine mérinos utilisée dans le fil Caprinae est d’origine française.
(c) L’Atelier Fibre Laine
Etapes de transformation
Chloé a rédigé un article détaillé sur le processus de tonte à la ferme, je vous invite donc à le lire si vous voulez en savoir plus.
La ferme travaille en coopérative donc le mohair est transformé et filé avec celui de tous les éleveurs qui adhèrent à cette coopérative (SICA Mohair). Le mohair qui revient à la ferme après transformation est donc celui de la ferme, possiblement mélangé à ceux d’autres producteurs.
La SICA mohair est située à Castres (Tarn, région Midi-Pyrénées). Elle emploie 2 personnes (Corinne et Sophie) chargées respectivement du fonctionnement administratif et du suivi de la transformation du mohair.
Leur site internet donne de plus amples informations sur cette structure, notamment sur les étapes de transformation, dont voici un résumé :
Extrait de la page http://www.sicamohair.com/?pid=15 :
Depuis la fermeture de la filature française de mohair en 2009, la SICA s’est vue contrainte de faire laver et filer son mohair en Italie. Après le lavage réalisé à Biella (Italie), un ruban est réalisé par cardage, qui démêle les fibres, et éventuellement par peignage, qui les aligne et élimine les plus courtes. La filature (Prato, Italie) se fait soit en cycle cardé, soit en cycle peigné; elle consiste en un étirage et une torsion des rubans. Les fils sont destinés au tricotage (mercerie ou bonneterie) ou au tissage, et reviennent en France pour être travaillés dans la région de Castres. Après toutes ces opérations, les produits subissent un contrôle (vérification du cahier des charges « LE MOHAIR DES FERMES DE FRANCE »). Seuls les produits conformes à ce cahier des normes se voient apposer une étiquette qui en garantit l’authenticité et la qualité.
La charte qualité « mohair des fermes de France » est consultable en cliquant ici.
Le mérinos est fourni par la filature Terrade située à Felletin, dans la Creuse (23). Cette filature, d’après un article de La Montagne paru en octobre 2017, emploie 7 salariés et 3 teinturiers, et cherche à développer sa gamme de teintures végétales. Sur le site de LCI, vous pouvez visionner un reportage montrant les étapes de transformation.
Traitements et teintures
Les fils disponibles en pelotes sont teints à la filature, avec des teinturesaux normes REACH : il ne s’agit pas d’un label mais d’une obligation européenne, qui correspond à « un système intégré unique d’enregistrement, d’évaluation et d’autorisation des substances chimiques dans l’Union européenne »
Extrait de la page Wikipédia :
Les importateurs et les fabricants doivent notifier les nouvelles substances. Celles-ci doivent obéir à la directive 67/548/CE, qui, depuis un amendement de 1993, exige en plus tests et évaluation des risques pour la santé humaine et l’environnement, lorsque la commercialisation prévoit des quantités supérieures ou égales à 10 kg/an. En dessous de ce seuil, une réglementation spéciale est prévue. Notification et évaluation ne signifient pas pour autant que les nouvelles substances ne sont pas dangereuses.
Les fils disponibles en écheveaux sont teints à la ferme avec des teintures acides, couleurs primaires de la marque Ashford. Cette marque déclare sur son site web que les colorants respectent les standards Oeko-Tex 100 (mais ils ne sont pas labellisés). Les teintures acides sont des teintures qui fonctionnent sur les fibres animales et qui ont besoin d’un environnement acide et de chaleur pour pénétrer et se fixer dans les fibres. Les ingrédients sont : eau + fibres + source de chaleur + acide citrique.
Extrait de la FAQ du site (traduit depuis l’anglais) :
Les colorants Ashford, s’ils sont utilisés correctement, ne sont pas dangereux pour les humains. Ce sont des colorants acides faibles qui sont fixés uniquement avec du vinaigre blanc commun et de la chaleur. Les fibres, les fils et les textiles teints avec les colorants Ashford peuvent être portés contre la peau sans risque.
Les colorants ne présentent aucun risque pour l’environnement si le liquide colorant est neutralisé avec du bicarbonate de soude avant d’être éliminé dans le système d’eaux usées.
Un e-mail a été adressé en mars 2018 à la marque Ashford pour leur demander la liste des ingrédients : ils ont répondu que ce n’était pas possible : « Unfortunately we do not have the privilege of the ingredients of the dye compound ».
Plus d’infos sur les standards Oeko-Tex 100 :
- http://www.oeko-tex.com/fr/business/certifications_and_services/ots_100/ots_100_start.xhtml
- http://www.oeko-tex.com/media/downloads/FAQ_STANDARD_100_EN.pdf (en anglais)
Pour résumer, Oeko-Tex est un label indépendant qui certifie des textiles exempts de produits toxiques pour la santé et l’environnement (chlore, pesticides, formaldéhyde, phtalates, etc.).
L’Atelier Fibre Laine déclare que les démarches pour obtenir la certification Oeko-Tex pour ses produits n’ont pas été réalisées en raison de la complexité et du coût de celles-ci, surtout pour une petite entreprise.
Les fibres ne sont pas traitées superwash.
(c) L’Atelier Fibre Laine
Le personnel
Chloé est la fondatrice et gestionnaire de l’Atelier Fibre Laine. Elle gère seule : l’élevage des animaux, la création, une partie de la teinture, la promotion, l’identité visuelle, les réseaux sociaux, la gestion des stocks, le service après-vente, la relation client, le site internet, la commercialisation…
A noter que les commandes sont envoyées dans un colis en carton avec peu ou pas d’emballage, dans une démarche de réduction des déchets.
L’Atelier Fibre Laine
- Moulin de Rousset – 87 140 Vaulry
- www.latelierfibrelaine.com
- Page Facebook / Page Instagram
- L’Atelier Fibre Laine dispose également d’un blog et d’un podcast audio
